Le président et premier dirigeant Scott Streiner s'adressant aux participants du congrès de l'Association canadienne des cultures spéciales, le 7 juillet 2016

On va de l’avant : Modernisation de la réglementation sur les transports au Canada

Le discours prononcé fait foi

Alors que je mettais la dernière main à mon discours hier soir, j'ai vu, en jetant un coup d'œil par ma fenêtre d'hôtel, les voies ferrées allant de la gare Union jusqu’à Ottawa, Montréal et Halifax. Je pouvais aussi voir la route express Gardiner et son état habituel d'engorgement. J’ai pu voir un navire d'expédition accosté au port de Toronto et un avion se préparant à atterrir sur l'île à l'aéroport Billy Bishop.  

J'ai alors été frappé de constater jusqu'à quel point la vue d'ensemble encapsule toute l’importance du transport au Canada et, en fait, de notre vie moderne.

Le transport au Canada

Dans le monde d’aujourd’hui, il est absolument inconcevable d’imaginer des sociétés et des économies modernes qui fonctionnent sans un réseau de transport national à la fois efficient et fluide. C’est aussi vrai ailleurs, mais surtout dans un pays aussi vaste que le Canada.

Étant donné la dispersion de notre population sur de grandes distances, la diversité de notre secteur manufacturier, de nos ressources naturelles, et, bien sûr, de notre production agricole, il est impératif d’avoir un réseau de transport national qui répond aux besoins de tous ses usagers et favorise des échanges économiques efficaces à l’échelle nationale.

C’est certainement vrai aujourd’hui, mais en fait, il en a toujours été ainsi.

Depuis les tout débuts, le transport a fait partie de la réalité canadienne. L’Acte de l’Amérique du Nord britannique – notre document constitutionnel fondateur – qui établissait les conditions de l’union pour la Colombie-Britannique lorsqu’elle a intégré la Confédération, renfermait des dispositions exigeant la construction de liaisons ferroviaires pour le transport de marchandises. Ces rubans d’acier, qui reliaient des fermes, des villes, des villages et des ports partout au Canada, sont en fait les pierres d’assise sur lesquelles le Canada d’aujourd’hui s’est édifié. 

Le réseau de transport national et l’Office

L’histoire de l’Office est inextricablement liée à l’évolution du réseau de transport national, de l’agriculture et d’autres secteurs qui dépendent de ce réseau au Canada.

Mis sur pied en 1904 sous le nom de la Commission des chemins de fer, l’Office a vécu plusieurs incarnations. Ses 113 ans d'existence font de lui le plus ancien tribunal indépendant et organisme de réglementation au Canada.

Durant cette période, il a changé de nom à plusieurs reprises et son mandat a été ajusté par le Parlement. Par contre, en l’essence, le rôle de l’Office demeure de veiller à ce que le réseau de transport national, en général, et le réseau ferroviaire pour le transport de marchandises, en particulier, fonctionnent de façon harmonieuse et répondent aux besoins des utilisateurs.

Tout compte fait, la raison d’être de l’Office est :

  • de créer un cadre juste et prévisible régissant la relation entre les fournisseurs de services de transport et les utilisateurs de ces services;
  • d’intervenir en cas de difficultés liées à cette relation.

Aujourd’hui, l’Office a trois mandats principaux :

  • Son premier mandat – veiller au fonctionnement du réseau national de transport – est le plus important sur le plan économique.
  • Son deuxième mandat est de protéger le droit fondamental des personnes ayant une déficience à un réseau de transport accessible.
  • Et son troisième mandat est d'offrir aux passagers aériens un régime de protection du consommateur.

Pour exécuter ces rôles, l’Office dispose de trois outils :

  • Son premier outil consiste à mettre en place des règles du jeu. Pour ce faire, il établit des règlements et élabore des lignes directrices, des codes de pratiques et des notes d’interprétation. 
  • Son deuxième outil est le règlement des différends. Lorsqu’un différend survient entre des expéditeurs ou des voyageurs et des fournisseurs de services de transport, l’Office peut déployer des mécanismes de règlement des différends informels et formels pour régler les différends et permettre aux parties d’aller de l’avant.
  • Son troisième outil consiste à compiler, analyser et diffuser de l’information sur le  réseau de transport dans son ensemble.

Défis dans le réseau de transport

Si le transport a été essentiel à l’édification du Canada, il est encore plus important aujourd’hui.

À l’échelle nationale, des échanges commerciaux représentant une valeur de près de 1,7 mille milliards de dollars dépendent du réseau de transport. Les principaux secteurs concernés sont ceux de la production agricole et des expéditions. Le Canada arrive au 5e rang mondial parmi les plus importants exportateurs de produits agricoles et accapare 35 % du commerce mondial de légumineuses à grain. En 2014, 64 millions de tonnes de grain ont été transportées par chemin de fer. Les réseaux portuaires et ferroviaires du Canada sont essentiels à la prospérité du secteur agricole canadien.

Même si cette relation entre le secteur agricole et les compagnies de chemin de fer en est une d’interdépendance, elle a souvent été ponctuée de défis.

Les producteurs et les expéditeurs se sont souvent sentis prisonniers d’une ou de deux compagnies de chemin de fer, ce qui les aurait empêchés d’exercer le pouvoir de négociation leur permettant d’obtenir des résultats qu’ils estiment équitables. Les compagnies de chemin de fer ont contesté ce concept et affirmé que les questions entourant la captivité et le pouvoir de marché étaient exagérées.

Nous avons pu observer plus clairement comment ces dynamiques se sont déployées à l’hiver 2014. Une récolte record, des conditions hivernales difficiles et un litige qui a fait écho sur la place publique entre les expéditeurs et les compagnies de chemin de fer ont contraint le législateur à adopter une loi spéciale encadrant les expéditions de grains.

À l'avenir, idéalement nous éviterons les situations de crise. Nous serons en mesure de prévoir l’évolution des situations et de maintenir la stabilité des relations.

Réagir aux changements

La mondialisation du commerce se traduit par d’immenses débouchés pour le secteur agricole, mais elle comporte aussi des pressions concurrentielles pour les expéditeurs et les compagnies de chemin de fer.

Les nouvelles technologies offrent des possibilités d’automatisation et une plus grande transparence, mais elles peuvent également exercer des pressions à la baisse sur les marges.

Bien entendu, nous observons également la venue de nouvelles pratiques opérationnelles touchant les secteurs de la production et des expéditions, ainsi que l'exploitation ferroviaire, qui ont commencé à transformer les dynamiques entre ces intervenants. Dans le contexte de tous ces changements ‒ au milieu de tout cela – la politique publique et l’administration publique doivent suivre la cadence.

Si l’Office veut accomplir le mandat qui lui a été conféré par le Parlement ‒ à savoir, maintenir un réseau de transport national qui fonctionne de manière efficiente dans l’intérêt de chacun ‒ il lui faudra aussi mettre au diapason les outils et les approches que nous utilisons.  

Nous tenterons de relever le défi que représentent ces changements et de réaliser notre mandat de manière efficace de quatre façons.

La première concerne le gouvernement de manière plus générale. Étant donné que nous sommes un organisme indépendant, nous ne sommes pas un intervenant aussi direct que Transports Canada dans cette gouvernance, dont l'avenue d’intervention passe par le changement législatif.

Le rapport de l’Examen de la Loi sur les transports au Canada a, comme vous le savez, été déposé en février de l'année en cours. Le rapport renfermait une série de recommandations visant la LTC, qui est la loi habilitante de l’Office des transports du Canada. Le ministre des Transports, l’honorable Marc Garneau, participe actuellement à des discussions avec des intervenants.

En s’appuyant sur les recommandations issues de l’Examen et sur ce que les différentes parties lui diront, le ministre Garneau prendra des décisions sur l’avenir du réseau de transport ‒ et sur la possibilité d’apporter éventuellement des changements à la LTC.

L’Office est disposé à fournir au Ministre et à ses représentants tous les renseignements et toutes les analyses qui pourraient leur être utiles pour mener à bien ce mandat.

Bien entendu, en tant qu’organisme ayant la responsabilité principale d’appliquer la LTC, nous pouvons faire part de nos observations sur les aspects les plus efficaces et les moins efficaces de la LTC et indiquer les outils qui sont absents de la trousse d’outils que nous utilisons pour accomplir notre travail.

Certains intervenants, et l'Examen de la LTC lui-même, ont suggéré d'étoffer la trousse d’outils de l’Office afin de lui donner entre autres la capacité :

  • d’amorcer des enquêtes de son propre chef lorsque des observations prêtent à penser qu'une question persistante touche le réseau de transport.
  • d’émettre des ordonnances générales qui s’appliqueraient à la grandeur d’un secteur s’il s’avère qu’un problème est systémique;
  • de compiler et d'analyser plus de données, et de diffuser cette information à grande échelle.

Ces recommandations issues des consultations auprès des intervenants et de l’Examen de la LTC méritent assurément d’être examinées par l’Office.

La deuxième observation est plutôt de nature interne et concerne notre compétence actuelle. Nous prenons des mesures pour nous assurer que nos services et nos activités suivent la cadence du changement susmentionné. Le 1er avril, j’ai procédé à une restructuration de l’Office qui vise à renforcer sa capacité dans des domaines clés et à accroître son efficience. Cette restructuration est axée sur la prestation des services.

Cette restructuration :

  • a regroupé les fonctions de nature plus stratégique sous l’égide de la nouvelle Direction générale de l’analyse et de la liaison;
  • a créé une équipe spécialisée dans notre Direction générale du règlement des différends, dont les interventions sont axées sur la médiation afin de régler des différends entre les compagnies de chemin de fer et les expéditeurs.

La création d’une unité spécialisée en médiation ferroviaire m’amène au troisième point sur lequel je désire insister pour ce qui est d'aller de l’avant ‒ il s'agit de la façon dont l’Office réagit à ce qui se passe dans le secteur agricole.

Il y a plusieurs préoccupations quant aux dynamiques entre les expéditeurs et les compagnies de chemin de fer. Un nombre relativement peu élevé de ces préoccupations est porté à l’attention de l’Office aux fins d'exercer des recours.

Après avoir discuté avec certains d’entre vous et d’autres expéditeurs, il me paraît évident que l'aspect laborieux de soumettre un cas au processus décisionnel formel est l'une des raisons expliquant qu'on n'y ait pas toujours recours. Un expéditeur qui souhaite soumettre un cas au processus décisionnel formel risque d’amorcer des instances qui s’échelonnent sur plusieurs mois, d’engager des dépenses importantes et éventuellement de ternir sa relation avec la compagnie de chemin de fer. Cela ne signifie pas pour autant que le processus décisionnel formel ne constitue pas une option de règlement des différends valable.

Je retiens de ces conversations qu’il importe que vous sachiez qu'il existe des solutions de rechange au processus décisionnel formel pour régler les différends entre les expéditeurs et les compagnies de chemin de fer, et, plus particulièrement, que l’Office procède au renforcement des services de médiation spécialisés à cet égard.

Nous ne sommes pas à la recherche de clients; tant mieux, si tout se passe bien. Toutefois, je vous encourage, en tant qu’expéditeurs, à garder en tête les services offerts par l’Office. Les mécanismes de recours comme ceux dont dispose l’Office se veulent un filet de sûreté. Comme toujours, il est préférable que des négociations commerciales saines se déroulent entre les parties et que l’organisme de réglementation ayant un pouvoir décisionnel, l’Office, n’ait à intervenir ou à fournir du soutien que dans des cas rares.

Enfin, notre quatrième façon de prendre des mesures est de moderniser la réglementation. L’Office des transports du Canada administre neuf règlements à lui seul et plusieurs autres en collaboration avec d’autres organisations.

Pour tout dire, certains de ces règlements sont désuets. Certains ont été établis il y a plus de vingt ans et les modèles opérationnels que nous observons dans le secteur des transports ‒ les pratiques exemplaires en matière de prise de mesures réglementaires et les attentes des utilisateurs à l’égard du réseau de transport ‒ ont beaucoup évolué au cours des dernières décennies.

Notre Initiative de modernisation de la réglementation

L’Office aurait pu continuer de tenter de régler ces questions une à la fois, de façon ponctuelle. Nous avons plutôt décidé en toute connaissance de cause de placer tous nos règlements sur la table et de procéder à une initiative de modernisation de la réglementation où nous disons aux parties « Nous sommes ouverts à engager des discussions sur tous ces textes ».

Nous avons débuté par l’objet premier de la réglementation ‒ quels objectifs voulons-nous réaliser à l’aide de ces règlements? Nous examinerons ensuite les textes existants et déterminons s’ils renferment des dispositions devenues inutiles qui devraient être supprimées. Existe-t-il des dispositions qui sont utiles et qui pourraient être conservées en l’état? Existe-t-il des dispositions qui servent à une fin, mais dont la formulation doit être mise à jour? Ou encore, faudrait-il ajouter de nouvelles dispositions?

Nous sommes prêts à procéder à un examen général de tous nos règlements afin de veiller à ce que :

  • pour la suite des choses, la formulation des règlements soit claire et en harmonie avec nos pratiques opérationnelles actuelles;
  • les obligations imposées aux parties qui sont assujetties à ces règlements ne soient pas plus contraignantes que nécessaire pour réaliser leurs objectifs en matière de politique publique;
  • ces règlements soient rédigés d’une façon qui nous permet de détecter et de corriger facilement les cas de non-conformité.

Plus particulièrement en ce qui a trait au transport ferroviaire de marchandises, nous tiendrons des discussions plus animées sur :

  • la réglementation sur l'interconnexion du trafic ferroviaire et les conditions d’exploitation;
  • l’établissement des coûts des activités ferroviaires aux fins des tarifs réglementaires; ou
  • toute autre question dont désirent discuter les expéditeurs ou les compagnies de chemin de fer.

En tant qu’organisme de réglementation, nous vous demanderons votre point de vue. De plus, nous fonderons notre analyse sur les objectifs fondamentaux en matière de politique publique des règlements et nous appliquerons une approche neutre fondée sur les faits pour déterminer ce à quoi devraient ressembler les règlements à l'avenir.

Nous avons prévu quatre vagues de consultations dans le cadre de nos travaux de modernisation de la réglementation. L'une d'entre elles devrait s’amorcer vers la fin de 2016 ou au début de 2017 et sera axée sur les questions touchant le transport ferroviaire. Je vous invite à nous faire part de vos commentaires lorsque viendra le moment de le faire.

Nous avons l’intention d’achever ces consultations et l’élaboration des nouveaux règlements d’ici la fin de 2017. Ensuite, nous achèverons les approbations et procéderons à une mise en œuvre en 2018. Certes, il s’agit d’un calendrier ambitieux pour des changements réglementaires, mais tout de même réalisable.

J’aimerais conclure en vous invitant à nous faire part de vos commentaires sur la réforme de la réglementation et à vous prévaloir au besoin de nos services de règlement des différends.

N’hésitez pas à communiquer avec l’Office pour toute préoccupation relative à vos relations avec le réseau de transport national et les services qu’il offre.

En fin de compte, l’Office a pour raison d’être de venir en aide aux expéditeurs, aux voyageurs, aux compagnies de chemin de fer et à d’autres fournisseurs de services de transport et aux collectivités qu’ils desservent. L’Office est prêt à venir en aide et à se mettre en action. Nous sommes déterminés à accomplir notre travail d’une manière impartiale, fondée sur des faits, novatrice et engagée.

En conclusion, n’hésitez pas à me poser vos questions et à me faire part de vos commentaires. Je vous remercie de votre attention et je remercie les organisateurs de m’avoir invité à vous parler aujourd’hui. 

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