Le président et premier dirigeant Scott Streiner prononce un discours lors du forum de la Age-friendly Societies, le 30 avril 2018

La version prononcée fait foi

De grands défis : Accroître l’accessibilité des déplacements pour les personnes de tous âges

Je suis ravi de prendre la parole dans le cadre du Forum des sociétés amies des aînés organisé par le Centre international de longévité Canada. Il va sans dire que la longévité consiste à avancer dans le temps et, lorsqu’il s’agit de notre propre vie, plus elle est longue, mieux c’est. Je tiens toutefois à vous assurer que je n’appliquerai pas le même principe ce soir, car je sais que, contrairement à une vie en santé, un discours peut facilement devenir trop long, surtout lorsqu’il s’agit du dernier point à l’ordre du jour avant que le réseautage et la partie amusante ne commencent! Je m’efforcerai donc de limiter mes observations à environ 20 minutes, après quoi je répondrai volontiers à quelques questions.

Nous avons la chance de vivre dans une ère de longévité sans précédent. Si l'âge n'est qu'un chiffre, voyons ce que nous disent les chiffres. Entre les années 1970 et la décennie en cours, la proportion d’aînés dans la population canadienne est passée de 8 pour cent à 14 pour cent. En 2016, pour la première fois, les aînés représentaient une plus grande part de la population canadienne que les enfants. Et on estime que les aînés pourraient représenter le quart de la population totale dans 20 ans.

Non seulement vivons-nous plus longtemps, mais nous demeurons en meilleure santé. La médecine moderne ainsi que de meilleurs choix, notamment l’importance accrue qui est accordée à l’exercice régulier, signifient que nous pouvons profiter d’un plus large éventail d’activités pendant plus longtemps que les générations précédentes.

Parmi ces activités figurent les voyages qui permettent de visiter la famille, les amis et de nouveaux endroits. Les aînés voyagent plus souvent et dépensent plus d’argent pour voyager que tout autre groupe d’âge.

Toutefois, il est vrai qu’avec le vieillissement vient la probabilité accrue d’avoir une forme quelconque de déficience. Bien entendu, ce ne sont pas tous les Canadiens plus âgés qui ont une déficience, mais nous savons que l’incidence des déficiences chez les personnes de 15 à 24 ans est inférieure à 5 pour cent, tandis que chez les personnes âgées de 75 ans et plus, elle dépasse les 40 pour cent. À mesure que nous vieillissons, il est bien possible, par exemple, que nous marchions plus lentement ou ayons besoin d’une aide à la mobilité, que nous voyions ou entendions moins bien, ou que nous ayons besoin de repas spéciaux ou de médicaments en raison de problèmes de santé comme le diabète.

Ces réalités ne devraient pas nous empêcher de continuer à mener une vie riche et remplie d’expériences intéressantes, incluant les voyages. Mais il faut que les services de transport qui nous amènent d’un bout à l’autre du pays et dans le monde entier soient attentifs et adaptés aux besoins liés à l’âge et aux déficiences. 

À l’Office des transports du Canada, l’OTC, nous sommes déterminés à promouvoir une telle attention et adaptabilité. Ce soir, j’aimerais vous faire part de certaines des mesures pratiques que nous prenons pour y parvenir. 

Accessibilité universelle

Notre point de départ est un virage conceptuel dans notre façon d’aborder l’accessibilité. 

Dans le passé, l’accessibilité était souvent envisagée dans l'optique de l’adaptation aux besoins individuels. Comme il y a toujours aujourd'hui des moments où les besoins particuliers d’un voyageur doivent être satisfaits de façon ciblée, les mesures d’adaptation individuelles demeurent une partie importante de la façon dont nous assurons l’accessibilité des services de transport. 

Mais nous devons commencer ailleurs. Les mesures d’adaptation individuelles devraient constituer le dernier recours. En effet, l’objectif global devrait être l’accessibilité universelle. 

Prenons, par exemple, les aires de débarquement et de prise en charge des passagers dans les aéroports. L’approche de l’accessibilité universelle donnera lieu à la construction d’une rampe – ce qui rendra l’espace physique accessible autant aux personnes en fauteuil roulant qu’à celles qui peuvent marcher – tandis qu’une mesure d’adaptation individuelle pourrait être de ne pas modifier le trottoir, mais de s’assurer qu’une personne est disponible lorsqu’il est nécessaire de faire monter le fauteuil roulant sur le trottoir.

Dans les deux cas, le voyageur arrive au comptoir d’enregistrement à temps. Mais dans le premier exemple, il se retrouve à l'intérieur plus rapidement et ne se sent pas montré du doigt ou dépendant. Et il n'a pas à attendre si le nombre de demandes d'assistance dépasse la disponibilité du personnel.

L'humoriste et journaliste australienne Stella Young, qui est née avec ce que l'on appelle la maladie des os de verre, a dit ceci : « Ma déficience existe non pas parce que j'utilise un fauteuil roulant, mais parce que l'environnement en général n'est pas accessible. »

En prenant tout d’abord des mesures visant à éviter et à éliminer les obstacles sur une base systémique – et en se tournant vers des mesures d’adaptation individuelles si, et seulement si, cela n’est pas possible – nous contribuons à préserver l’indépendance et la dignité de tous les voyageurs. 

Dans une société qui est aussi engagée envers l’égalité et l’inclusion que le Canada, cela devrait suffire à nous motiver. Mais l’optimisation de l’accessibilité n’est pas seulement une bonne chose pour les voyageurs; c’est aussi une bonne chose pour les affaires. La situation économique des compagnies aériennes, des entreprises de transport ferroviaire de passagers, des exploitants de traversiers, des aéroports et des gares maritimes repose habituellement sur des coûts irrécupérables importants et de minces marges de profit, de sorte que ces exploitants ont besoin de volumes de passagers pour rentabiliser leurs activités. Cela signifie que ces exploitants en profitent lorsque des services accessibles attirent plus de clients.  

Comment pouvons-nous faire progresser l’accessibilité universelle pour les voyageurs de tous âges? En se préoccupant de l’accessibilité lorsque des installations sont planifiées, construites et rénovées… Lorsque l’équipement est conçu, acheté et modernisé… Lorsque les politiques et procédures sont rédigées et mises en œuvre… Lorsque le personnel est formé et que son rendement est évalué.

Nous faisons progresser l’accessibilité universelle en étant proactifs plutôt que réactifs, en étant engagés plutôt qu’indifférents, et novateurs plutôt que conservateurs.  

Modernisation de la réglementation

L’un des outils utilisés par l’OTC pour encourager la proactivité, la mobilisation et l’innovation dans la promotion de l’accessibilité est la réglementation intelligente. 

En mai 2016, nous avons lancé l’Initiative de modernisation de la réglementation (IMR), un examen exhaustif de l’ensemble des règlements et les lignes directrices que nous administrons pour nous assurer qu’ils suivent l’évolution des modèles opérationnels, des attentes des utilisateurs et des pratiques exemplaires dans le domaine de la réglementation. La première phase des consultations sur l’IMR a été consacrée au transport accessible. Les commentaires reçus du Comité consultatif sur l’accessibilité de l’OTC (dont les membres comprennent la Fédération nationale des retraités et la Fédération de l’âge d’or du Québec), des organismes de défense des droits des personnes ayant une déficience, de l’industrie, d’experts et de citoyens canadiens ont largement appuyé la mise en place d’une nouvelle réglementation sur les transports accessibles prévoyant ce qui suit :

  • l’intégration de deux règlements relatifs à l’accessibilité et de six codes de pratiques volontaires en un seul règlement complet;
  • l’établissement de normes claires sur tous les aspects visés ‒ qu'il s'agisse de dispositifs de contrôle dans les toilettes et de sièges qui nécessitent une force minimale, ou de documents sur divers supports, y compris les documents à gros caractères ‒ tout en laissant place à des solutions créatives;
  • le renforcement de l’obligation de former adéquatement le personnel sur le plan de la prestation des services aux personnes ayant des besoins liés à l’accessibilité;
  • l’établissement, par les fournisseurs de services de transport, de plans d’accessibilité pluriannuels et de rapports d’étape réguliers.

La rédaction est en cours. Nous prévoyons finaliser le règlement, qui nécessitera l’approbation de l’OTC et celle du Cabinet, plus tard cette année.

Éducation et application

Des règles modernisées sont essentielles pour que le plus grand nombre possible de Canadiens aient la possibilité de voyager, mais notre travail ne s'arrête pas là. Une fois les règles en place, nous devons nous assurer que les voyageurs ayant une déficience connaissent leurs droits et que les fournisseurs de services de transport comprennent leurs obligations et s’y conforment.

C’est la raison pour laquelle l’OTC a publié des guides sur l’accessibilité au fil des ans, et que notre Centre d’expertise sur le transport accessible dirigera les mesures prises pour informer les voyageurs et les fournisseurs de services des dispositions du nouveau règlement sur les transports accessibles lorsqu’il entrera en vigueur.

L’information sera transmise dans un langage clair, au moyen de formats en ligne et d'autres formats traditionnels, et par l’intermédiaire de partenariats avec d'autres organisations, y compris, nous l'espérons, le Centre international de longévité Canada, pour faire passer le message. 

L’optimisation de la conformité est évidemment dans l'intérêt des voyageurs, mais c'est aussi dans l'intérêt des fournisseurs qui respectent les règles et ne devraient pas être injustement désavantagés parce que leurs concurrents ne le font pas. Un programme efficace d'assurance de la conformité ne fait pas qu'améliorer l'accessibilité pour les voyageurs; il établit aussi des règles du jeu équitables pour les entreprises qui offrent des services de transport à ces voyageurs.

Règlement des différends

Même avec les règles les plus claires, les efforts d'éducation les plus pertinents et le meilleur programme de conformité, il y aura toujours des désaccords entre les voyageurs et les exploitants. Parfois, le différend survient parce que leurs points de vue diffèrent sur la façon d’interpréter une règle. Parfois, le différend vient du fait que le sujet n'est pas couvert par une règle expresse, mais seulement par un principe général.

C'est là que les services de règlement des différends de l'OTC entrent en jeu. Lorsqu’un voyageur dépose une plainte, nous tentons d’abord d’aider les parties à en arriver à un règlement mutuellement acceptable au moyen de la facilitation et de la médiation. Toutefois, si ces méthodes informelles ne fonctionnent pas, nous pouvons procéder au processus décisionnel formel et rendre une décision exécutoire.

Notre statut de tribunal quasi judiciaire est plus évident dans le contexte d'un tel processus, durant lequel nous recevons et évaluons les éléments de preuve et les arguments, nous statuons sur des questions de procédure et des demandes d’intervention, et nous sommes liés par les principes de justice naturelle et d’équité procédurale. 

Le nombre de plaintes concernant l’accessibilité des services de transport est en hausse constante. En 2017-2018, nous avons reçu 123 plaintes de ce genre, soit près du double de ce que nous avons reçu en 2015-2016. De ces 123 plaintes, toutes, sauf trois, visaient les compagnies aériennes et près de la moitié portaient sur des services offerts aux personnes qui ont besoin de fauteuils roulants ou d’autres aides à la mobilité.

L’une des décisions qui ont suscité beaucoup d’attention de la part des médias concernait l’entreposage de scooters à bord des trains de VIA Rail. Après avoir entendu les présentations de VIA et de deux conjoints qui voyagent ensemble et se déplacent en scooter, l’OTC a ordonné à VIA de fournir des conseils plus clairs à son personnel sur la façon de manipuler les aides à la mobilité, et d’envisager l’entreposage de deux scooters dans la zone munie de dispositifs de retenue d’un même wagon, ou de s’assurer que chaque train comporte plus d’une zone munie de dispositifs de retenue. 

Comme certains aspects de l'affaire font encore l’objet d’un examen, il ne m’est pas permis de donner plus de détails, mais j’aimerais seulement souligner que VIA et le gouvernement ont récemment annoncé un important projet de renouvellement de la flotte dont l’un des grands objectifs est l’accessibilité universelle, y compris un nombre suffisant de dispositifs de retenue pour les aides à la mobilité. Le Centre d’expertise en transport accessible de l’OTC collaborera avec VIA tout au long du projet pour l’aider à atteindre cet objectif.

Sur la scène internationale

Avant de terminer, j’aimerais parler brièvement de la scène internationale, sur laquelle l’OTC s’emploie à promouvoir un ensemble commun de principes d’accessibilité pour le transport aérien. Les avions traversent souvent les frontières, de sorte qu’un consensus mondial sur la façon de les rendre plus accessibles profitera à la fois aux voyageurs ayant des besoins différents – qui subiront moins d’écarts dans les niveaux de services et de mauvaises surprises à bord des avions dans différents pays – et aux compagnies aériennes – qui n’auront pas à se conformer à des régimes qui diffèrent grandement d’un pays à l’autre.

L’Organisation de l’aviation civile internationale, l’OACI, dont le siège est à Montréal, est l’endroit où un tel consensus peut être établi. Et la tribune qui permettra de le ratifier est l'assemblée générale de l'OACI, qui a lieu tous les trois ans. Bien que les discussions multilatérales soient toujours longues, nous pourrons sans doute, avec un peu d’effort et de bonne volonté, convenir d'une déclaration sur les principes d’accessibilité à l’Assemblée générale de 2019 de l’OACI.

Parallèlement, l’OTC s’emploie à faciliter les interventions transfrontalières axées sur la collaboration pour relever les défis liés à l’entreposage et au transport des fauteuils roulants et d’autres aides à la mobilité à bord des aéronefs – défis qui prennent de l’ampleur et qui sont plus complexes sur le plan technologique. Les 12 et 13 juin, nous tiendrons à Toronto un forum qui réunira des groupes de défense des droits des personnes handicapées, des compagnies aériennes, des constructeurs d’aéronefs, des fabricants de fauteuils roulants, des organismes de réglementation et des experts du Canada et d’ailleurs pour commencer à chercher des solutions qui permettront aux personnes qui comptent sur ces aides de voyager par avion. 

Conclusion

En conclusion, j’aimerais citer un dicton qui a été attribué à la fois à Mark Twain, à Satchel Paige et à Jack Benny : selon le premier, le deuxième ou peut-être les trois, l’« âge est une question de domination de la matière par l'esprit : si ça ne vous dérange pas, c’est que ça n'a pas d'importance ».

Cet aphorisme est rempli de sagesse. Nous savons tous qu’une attitude positive peut faire toute la différence. Comme l'a fait remarquer Helen Keller – et ici, il n'y a aucun doute quant à la source de la citation – « aucun pessimiste n'a jamais découvert le secret des étoiles, navigué jusqu’à des terres inconnues, ou ouvert une nouvelle voie pour l'esprit humain ».

Cela dit, une attitude positive est une condition essentielle, mais elle ne suffit pas pour réussir. Pour améliorer les choses, il faut également prendre des mesures concrètes.

Un mélange d’optimisme, de but précis et de concentration sur l’action concrète compose la stratégie en plusieurs volets de l’OTC qui vise à assurer des services de transport accessibles pour tous, des aînés malentendants qui veulent voler vers de nouvelles aventures, aux voyageurs en fauteuil roulant qui veulent prendre le train pour voir leurs petits-enfants, en passant par les familles multigénérationnelles qui veulent monter à bord d’un navire de croisière pour célébrer une occasion spéciale. 

L’objectif explicite, mais ambitieux de l’OTC consiste à rendre le réseau national de transport du Canada le plus accessible au monde. 

Comme il existe depuis 114 ans, l’OTC est en soi un exemple de longévité. En misant sur notre expérience en tant que plus ancien tribunal spécialisé indépendant et organisme de réglementation au Canada, nous contribuerons à concrétiser cette vision.

Je vous remercie de votre attention.

"Nous faisons progresser l’accessibilité universelle en étant proactifs plutôt que réactifs, en étant engagés plutôt qu’indifférents, et novateurs plutôt que conservateurs."
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